Cérémonie en hommage aux victimes de l'explosion de la rue de Trévise - mercredi 12 janvier 2022

Actualité
Mise à jour le 17/01/2022
Trois ans après la terrible explosion qui a endeuillé tout un quartier du 9e, les associations Trévise Ensemble et Victimes et Rescapés de la rue de Trévise, en lien avec la Mairie du 9e, se sont réunies ce mercredi 12 janvier avec l'ensemble des victimes pour un temps de recueillement.
Discours de Delphine Bürkli, Maire du 9e arrondissement de Paris:
"Merci Dominique! Merci Linda!
D’abord c’est toujours très émouvant pour vous, pour moi de prendre la parole chaque 12 janvier. C’est à la fois un moment de commémoration, mais c’est aussi évidemment un moment douloureux pour vous, je le sais.
Nous appréhendons toujours de nous retrouver à cette date du 12 janvier à 09:00.
Mais il est non seulement nécessaire mais utile de nous rassembler ici pour ne pas oublier ce drame, cette explosion de gaz d’une violence inouïe, qui a ôté la vie à quatre innocents, blessés grièvement des dizaines de personnes et arrachés de leur domicile des centaines d’habitants hagards et choqués. Cette année tout particulièrement, je voudrais vous dire, Chères Linda et Dominique, à quel point je vous admire.
Personne n’est prêt à devenir une victime, personne n’a envie d’enfiler ce costume qui colle à la peau et qu’on est incapable de ranger au placard tellement on est habité par ces souffrances, et par la mission que vous vous êtes fixées, tel un sacerdoce, celle d’aider les autres victimes avec pugnacité. Et nous avons, je crois, à la fois appris à nous connaître et à nous rassembler et à rester soudés, en toutes circonstances, face à l’adversité.
Je veux saluer toutes celles et tous ceux qui sont dans nos esprits depuis trois ans, et certains sont parmi nous ce matin.
Je vois Océane, la compagne de Nathanaël Josselin, je pense ce matin aux parents de Simon Cartanaz, au compagnon d’Adèle et à Luis-Miguel et ses trois enfants qui ont perdu Laura. Il y a trois ans, juste au-dessus de nous, au premier étage du 6, Trévise, et au premier étage de l’hôtel, deux couples étaient à jamais séparés par ce drame.
Je pense aussi avec beaucoup d’émotion à Monsieur Grandamy et à Raphaël Thierry qui nous ont quittés quelques mois après l’explosion. Une explosion qui a miné leur vie au point de la leur retirer.
J’ai une pensée affectueuse pour les blessés des hôtels, bien sûr Ines et sa maman Dounia. Inès a subi il y a cinq jours sa 42e opération. Elle souffre actuellement sur son lit d’hôpital. Elle fait preuve d’un courage et d’une résilience absolument admirable. Je pense aussi à Angèle, Amor, Ameroch, Pedro, Céline.
Je vois aussi dans l’assistance, celles et ceux qui ont perdu leurs toits et tous les souvenirs qu’ils abritaient : Jacques, Vanessa, Stéphane, Imène, Florent, Véronique, Elisabeth, Gilles, Emmanuel, et tant d’autres avec lesquels j’ai tissé des liens de confiance et de complicité.
Je pense aussi aux touristes qui résidaient dans les hôtels et qui depuis vivent loin de Paris ce drame personnel et collectif.
À vous, les habitants et commerçants du quartier, je veux dire aussi merci! Vous êtes là depuis le premier jour et vous êtes encore là aujourd’hui.
Permettez-moi de saluer également la présence de Madame Frédérique Calandra, DIAV, Monsieur le Député Sylvain Maillard, Madame la Maire du 10e, Alexandra Cordebard et les élus du 9e.
Merci à tous pour votre présence.
Chaque 12 janvier, à la même heure, je serai là à vos côtés pour nous souvenir du drame que nous avons traversé. Comme au premier jour, lorsque les victimes, les sinistrés affluaient dans la cour de la mairie du 9e, pour trouver refuge. Et là dans un élan de solidarité, les équipes de la mairie du 9e, élus et fonctionnaires ont répondu présents, les habitants spontanément ont déposé des vêtements, des couvertures, même des jouets, donnant tout son sens au mot fraternité et je n’oublierai jamais cet instant-là.
Bientôt, je l’appelle de mes vœux, vous rangerez enfin toutes et tous vos habits de victimes, cette histoire qui vous colle à la peau, parce que vous aspirez tous à reprendre le cours de vos vies, redevenir celles et ceux que vous étiez avant l’explosion, pour déambuler dans ce quartier, dans cette rue, mais vous n’oublierez jamais celles qui ont perdu leurs vies, Laura et Adèle, ceux qui ont donné leur vies, Nathanaël et Simon, les deux pompiers morts dans l’exercice de leurs fonctions, vous n’oublierez jamais non plus, celles et ceux qui souffrent et souffriront toujours dans leur chair et qui ne retrouveront jamais leur vie d’avant.
Jamais, nous n’oublierons ce 12 janvier 2019."
Discours de Dominique Paris, présidente de l'Association Trévise Ensemble:
" Je suis Dominique Paris la Présidente de l’association Trévise Ensemble, qui a vocation à fédérer les victimes de l’explosion du 12 janvier 2019.
Cette année, Nous avons voulu placer ce moment et l’année à venir sous le signe de l'humain. c'est le message des photos de cette année, comment nous avons vécu ces 3 longues années et comment nous pouvons nous projeter dans demain.
Un 3ème souvenir et il va encore en falloir un 4ème…. parce que notre quartier celui qui est dans notre souvenir….. sa reconstruction va encore prendre encore du temps ….
Que voyons-nous ? côté impair, les hôtels flambant neufs et dans un bien meilleur état qu’avant l’explosion du 12 janvier 2019. Côté pair la désolation. Et autour ? pour les riverains ? le bruit, la poussière, depuis 3 ans et encore demain. Nous espérons que le 6 rue de Trévise sera reconstruit mi-2024 ou fin de 2024. Encore 3 longues années !
Et nous, les personnes ? rien ou quasi rien. Nous les victimes toujours dans l’attente, l’attente de la reconnaissance d’être des victimes de cet accident collectif, l’attente d’une indemnisation digne.
C’est ça, un accident collectif sur la voie publique dans Paris !
Réunions, CLAV, conférences de Presse, interviews, nous avons été sur le pont avec VRET, la Fenvac, la Mairie du 9ème, nos avocats et le Médiateur.
Vous avez pu avoir l’impression que rien ne bougeait, que rien n’avançait jusqu’à notre réunion du 13 septembre 2021, où enfin Madame Frédérique Calandra, déléguée interministérielle à l’aide aux victimes nous a enfin confirmé que cet accord-cadre pouvait être signé par la Ville de Paris, plus de 9 mois après le rapport de Maître Bernard de Froment, mandaté par la Mairie du 9è, qui nous indiquait que cela était possible, et plus de 2 ans après notre réunion du 6 janvier 2020 où nous réclamions cet accord.
Un seul but, un seul objectif, sous le signe du combat pour la mise en place d’une convention d’indemnisation et de son financement, afin de dédommager de manière intégrale, rapide et transparente les dommages subis, d’ordre physique, psychique, matériel et économique pour l’ensemble des victimes.
Alors oui, nous l’avons, cet accord. Nous n’avons pas encore le texte de l’accord du fait de la confidentialité de la Médiation. Mais comme me l’a dit Maitre Elsa Crozatier à minuit lundi, c’est un bel accord. et demain ? vous le savez, Delphine Burkli et son équipe et tous ceux qui nous accompagnent depuis 3 ans seront à nos côtés, quotidiennement comme toujours, pour veiller à son application. Nous rencontrons le médiateur cet après-midi, la Ville de Paris nous a promis hier de veiller à sa rapide et juste application. Le bout du tunnel enfin ?
Alors, Oui, nous sommes tous, encore très en colère. Mais, nous devons nous occuper de cette colère, de cette colère qui nous fait du mal. C’est pourquoi je voudrai finir par ce très beau poème du moine Thich Nhat Hanh, écrit après le bombardement de la ville de Ben Tre au nord Vietnam.
Non, je ne pleure pas
Je tiens mon visage à deux mains
Pour réchauffer ma solitude
Deux mains protégeant
Deux mains nourrissant
Deux mains empêchant mon âme
de me laisser en colère. »
Discours de Linda Zaourar, présidente de l'Association Victimes et Rescapés de la rue de Trévise:
Je suis Linda Zaourar, Présidente de l’association VRET - Victimes et Rescapés de l’Explosion de la rue de Trévise
Bonjour à toutes et à tous, nous vous remercions pour votre présence.
Nous saluons la présence de :
Madame Frédéric Calandra, déléguée interministérielle à l’aide aux victimes
Madame la Maire de Paris, Anne Hidalgo, Monsieur Grégoire le première adjoint
Madame Cordebard la Maire du 10eme
Monsieur le Député, Sylvain Maillard
Le 12 janvier 2019, nous avons été blessés au plus profond de notre être, dans notre chair, dans nos rêves, dans notre histoire.
Ne jamais oublier,
L’immense peine et la douleur d’avoir perdu un être cher, la vie, les espoirs, les rêves brisées.
La douleur de Elsa, Miguel et Hugo, orphelins de Laura, et celle de son de son époux Luis Miguel, et de toute sa famille
La douleur de Kelyan, orphelin de Nathanaël, et celle de son épouse Océane, et de toute sa famille
La douleur de la famille de Simon, et celle de son épouse Anaïs
La douleur de la famille de Adèle
Tous sont décédés le 12 janvier 2019
Nous avons une pensée profonde pour les familles des endeuillés
N’oublions pas,
La vie, les espoirs , les rêves brisées de Ines, Angela, Amor, Ameroche salariés des hôtels, tous devenus handicapé.
Nos touristes blessés
Les victimes ayant subis un choc post traumatique blessée au plus profond de leur être
« Pour les victimes devenues handicapées, les blessés physiques et psychosomatiques, les orphelins, les endeuillés, c’est véritablement un jour sans fin.
Aujourd’hui, je m’exprime au nom de toutes les victimes regroupés dans notre association.
Nous n’avons pas quitté le 12 janvier 2019. Cette année encore, certains ont passé les fêtes à l’hôpital et pour les autres, les interventions chirurgicales ont repris depuis le début du mois de janvier. Nous avons une profonde pensée pour Ines actuellement hospitalisée, elle vient de subir sa 42éme intervention.
Les orphelins ne sont toujours pas reconnus en tant que victimes.
Nos liens sont très forts, nous sommes liés à JAMAIS !
Nous, victimes mutilées devenues handicapées, notre vie est à jamais brisée. Nous devons au quotidien surmonter nos souffrances physiques et psychologiques ; nous sommes obligés de nous battre afin que l’intégralité des frais médicaux soit prise en charge.
Nous, orphelins et endeuillés, nous sommes anéantis par la mort de l’être cher, nous avons perdu notre pilier, notre rayon de soleil. Nous ressentons chaque jour qui passe comme une épreuve insurmontable ; en dépit de cela, nous ne sommes pas reconnus comme victimes !
Nous, victimes post-trauma, blessées au plus profond de notre être, nous gardons, ancré en nous, d’avoir été exposées à l’insupportable : la vision d’une scène de guerre, l’horreur, la douleur, la terreur, la peur, la mort. Nous vivons avec un sentiment de culpabilité : celui du survivant ; et malgré cela il faut justifier de nos blessures dites « invisibles ».
Notre combat de chaque instant se situe sur tous les fronts, dans un monde hyper violent, pour veiller à ce que tous les préjudices soient bien pris en compte, que le statut de victimes soit reconnu aux orphelins, que personne ne soit oublié ou laissé de côté.
La maltraitance a commencé dès le départ. Pendant ces trois années, nous avons été confrontés au pire de ce qui peut exister dans le genre humain : l’abandon, le mépris. Les belles rencontres, comme avec Delphine Bürkli et Sophia Seco ont été très rares. Nous aurions eu besoin de davantage de mains tendues.
Nous restons debout, malgré tout, malgré les séquelles, les douleurs, les angoisses. malgré qu’on ne nous laisse pas la possibilité de nous soigner, de nous reconstruire.
ET, OUI ! Durant ces trois Il a fallut puiser au plus profond de notre être, trouver l’énergie au quotidien.
En 2022, nous pourrions espérer un rayon de soleil, se réinventer une histoire ; malheureusement, nos blessures demeurent, notre perte est trop importante pour réécrire l’histoire, envisager la résilience.
Nous avons un souhait que notre vécu reste dans les mémoires, pour que plus jamais de victimes soient abandonnées et livrées à elles mêmes !
Nous tenons à remercier chaleureusement :
Julie, Un grand Merci pour les photos, Geneviève un grand merci pour les beaux textes.
Arthur Simony, Un grand Merci Infiniment
Très chère Delphine, que serions nous devenus sans toi ? Merci d’être là, avec et pour les victimes, merci pour ton humanité, Merci pour ta fidélité.
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