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Cérémonie en hommage aux victimes de la rue de Trévise - Mardi 12 janvier 2021

Mise à jour le 12/01/2021
Discours de Delphine Bürkli, Maire du 9e arrondissement de Paris.
"Merci Dominique, merci Linda, merci à toutes les deux, pour vos témoignages si forts qui nous replongent dans cet instant tragique que fût cette explosion dévastatrice, il y a deux ans, jour pour jour, heure pour heure.
Comme vous, je l’oublierai jamais le 12 janvier 2019.
Ce moment de commémoration, nous le partageons avec toutes celles et tous ceux qui ont souhaité être parmi nous ce matin :
- bien sûr les victimes, celles et ceux qui ont perdu un proche, je veux saluer avec le lieutenant-colonel Guenanten et le capitaine Destribats, les familles des deux pompiers Nathanaël Josselin et Simon Cartanaz, tombés dans l’exercice de leur mission. Je n’oublie pas le Général Jean-Claude Gallet qui, avec bravoure et courage, commandé les opérations ce matin là.
- les blessés, Ameroch, vous représentez ce matin avec Linda les salariés blessés des hôtels,
- les sinistrés, celles et ceux qui ont perdu leurs toits et tous les souvenirs qu’ils abritaient,
- les habitants et les commerçants de notre quartier, vous êtes là depuis le premier jour et vous êtes encore là aujourd’hui.
- Permettez-moi également de saluer la présence de Madame Frédérique Calandra, Déléguée interministérielle d’aide aux victimes, Monsieur le Député Sylvain Maillard, Madame la Maire du 10e, Alexandra Cordebard, Monsieur l’adjoint à la maire de Paris, Nicolas Nordmann et les élus du 9e arrondissement.
Merci à tous pour votre présence.
Ce matin, je pense à Luis-Miguel qui était venu passer un agréable week-end à Paris, il y a deux ans, avec Laura son épouse. Aujourd’hui, il élève seul ces trois enfants à Tolède. Je recevais de Luis-Miguel, il y a quelques jours, une vidéo émouvante et poignante de ses deux fils et de sa fille ouvrant leurs cadeaux de Noël … un deuxième Noël sans leur maman. J’ai bien entendu une pensée pour Adèle et Philippe. Il y a deux ans, juste au-dessus de nous, au premier étage, ce couple était à jamais séparé par ce drame. Philippe sera le seul rescapé.
Je pense aux 66 blessés dont 10 d’entre eux ont été grièvement atteints. Ameroch, vous étiez avec Angela, Amor et Inès à votre poste de travail le jour de l’explosion. Tous les quatre, vous devez encore subir des interventions chirurgicales extrêmement lourdes. Parmi vous, Inès, 24 ans, brillante étudiante en droit, qui pour payer ses études avait trouver ce job le temps du week-end. Le 12 janvier 2019, elle prenait son poste, ici, pour la deuxième fois, dans cet hôtel. En quelques secondes, sa vie a basculé. Je pense à elle, à sa famille, à tous les efforts et à l’amour que sa mère Dounia lui prodigue chaque jour, pour surmonter cette terrible épreuve.
Je pense à toutes ces familles et à leurs enfants choqués et sauvés pour certains in extremis, par les pompiers. Tous portent dans leurs cœurs, dans leurs âmes les stigmates invisibles mais bien présents de la douleur et du choc psychologiques, quasi intacts 24 mois après.
Je pense à tous les touristes qui résidaient dans l’hôtel et qui depuis vivent loin de Paris, ce drame personnel et collectif. À tous ces anonymes, qui ne se sont jamais manifestés auprès de nous et qui, ont eux aussi, été marqués par ce drame.
Aussi surprenant, aussi contradictoire que cela puisse vous paraître, je ressens ce matin une forme d’apaisement, à nous retrouver, à vous retrouver … comment vous le dire … pour se tenir chaud, pour ne jamais perdre la mémoire, pour que jamais nous n’oublions cette explosion, pour que jamais plus un pareil événement d’une telle ampleur ne se reproduise, à Paris ou ailleurs.
Je crois que nous pouvons dire qu’aujourd’hui nous formons une grande famille. Régulièrement, pour ne pas dire chaque semaine, nous prenons des nouvelles les uns, les autres, avec dignité, avec sobriété, sans sombrer dans le pathos, et cette solidarité force l’admiration, une admiration que je ressens pour vous quand je vous vois. Et quand l’un de nous perd espoir, il y a toujours une main qui se tend, pour ne laisser personne au bord du chemin.
Au plus profond de nous, nous aimerions ne plus jamais avoir à nous souvenir de ce drame, y penser pour certains d’entre vous, je le sais, est une souffrance. Alors, garder la mémoire c’est pour nous être, d’abord, combatifs, pour obtenir réparation.
Ce matin, je ressens aussi une forme de colère froide. Quand je vois de ce côté les hôtels dont la rénovation est quasi achevée et de l’autre les immeubles d’habitation qui sont encore des corps brisés et détruits. Les déménagements viennent à peine de commencer, et il a fallu attendre 18 mois pour que les gravats soient enfin déblayés, une opération délicate menée sous l’autorité de Stéphane Tanguy que je tiens à remercier.
Nous avons déjà perdu beaucoup trop de temps En expertises, en contre expertises, en batailles judiciaires souvent stériles.
Ce temps suspendu nous parait interminable, un sentiment largement amplifié par la crise de la covid19 qui a été pour toutes les victimes une double peine : en plus d’être chassées de chez elles, ces victimes se sont retrouvées confinées dans un autre chez soi, sans repères, sans souvenir, sans la chaleur du foyer, les procédures judiciaires suspendues, sans parler des blessés qui n’ont pas pu recevoir de soins qu’ils soient psychologiques ou psychiques.
Au-delà de la pierre broyée, qui n’a toujours pas cicatrisé, je vois surtout les trajectoires humaines qui n’en peuvent plus de devoir toujours et encore justifier de leur statut de victime. Il est plus que jamais urgent de mettre en place un accord-cadre d’indemnisation pour bien sûr aider financièrement les victimes.
Demain, bientôt, le plus rapidement possible, je l’espère, nous l’espérons, ce quartier retrouvera son visage d’hier. Mais jamais nous n’oublierons ce que des centaines d’habitants et de victimes ont enduré.
Merci encore pour votre présence à nos côtés ce matin. Ensemble, nous avons toujours su enjamber les obstacles et les doutes, et j’ai foi en nos institutions pour que réparation et justice soient faites, et vous pourrez toujours compter sur moi."

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